Challenges: “Zéro immigration illégale” : les vérités du bras droit de Viktor Orban

Challenges: “Zéro immigration illégale” : les vérités du bras droit de Viktor Orban

Balázs Orbán, conseiller du Premier ministre hongrois, défend une ligne conservatrice dure. Et se rêve en chef de file des droites illibérales. Challenges l’a rencontré.

Tout sourire, Balázs Orbán s’installe sur une bergère Louis XV, dans le fastueux salon de réception de l’ambassade de Hongrie à Paris. Il rentre du Qatar, où il accompagnait Viktor Orbán à une conférence.

Yeux bleu vif, visage juvénile, ce trentenaire affable porte le même patronyme que le Premier ministre hongrois. S’ils ne possèdent aucun lien familial, Balázs Orbán cultive avec lui une étroite parenté idéologique: cet universitaire, juriste de formation, est son principal conseiller politique.

Le spin doctor assume sans complexe ses convictions conservatrices dures. Au sein du Vieux Continent, ce fervent catholique défend des questions “de civilisation”. “De nombreux politiques oublient ce qui a été le pilier fondamental du succès de l’Europe: l’idée de tradition, l’idée de famille, l’idée de Dieu.” Lui, non.

La Hongrie, cheffe de file des droites “illibérales” ?

Sur l’immigration, aucun compromis. “La position hongroise est très ferme: zéro immigration illégale.” Pourtant, la crise démographique n’oblige-t-elle pas son pays à faire appel à des travailleurs immigrés, afin de répondre aux graves pénuries de main-d’œuvre? “Vous faites référence au statut de travailleur invité, qui concerne l’immigration légale, rétorque-t-il sans se démonter. Dans ce domaine, nos règles sont les plus strictes de l’Union européenne: si un emploi peut être occupé par un Hongrois, il ne peut l’être par un étranger.”

Des restrictions que le Parlement hongrois travaille à durcir encore, se réjouit-il. Avec l’Ukraine voisine, il prône en revanche la solidarité, tout en cultivant l’amitié russe: “Nous prenons nos obligations humanitaires très au sérieux, souligne-t-il, avec plus de 10.000 passages de frontière par jour avec l’Ukraine.”

Le petit pays européen se rêve en chef de file des droites “illibérales”. “La droite européenne devrait être unie, c’est la raison pour laquelle nous discutons avec tout le monde pour identifier ceux qui veulent travailler ensemble.” En mai, un think tank a organisé la deuxième édition hongroise de la CPAC, la Conservative Political Action Conference, née aux Etats-Unis. Aucun chef d’Etat n’y a fait le déplacement, observe-t-on. Giorgia Meloni a envoyé de “nombreux représentants” et Jordan Bardella, le président du Rassemblement National, était présent, objecte Balázs Orbán.

Ron DeSantis jugé “merveilleux”

Faut-il y voir le signe des fractures qui divisent le camp conservateur depuis la guerre en Ukraine? Comment imaginer que le mouvement Fratelli d’Italia de Giorgia Meloni et le parti Droit et justice (PiS) polonais, farouchement pro-ukrainiens, puissent rester proches du très poutinophile Viktor Orbán? Le conseiller politique a encore réponse à tout. “Nous pensons que plus vite ce conflit se terminera, mieux ce sera pour tout le monde”, admet-il.

 

Mais il ne voit là que “des malentendus tactiques”, pas de nature à entamer l’entente profonde entre son pays et la Pologne. “Nous sommes amis depuis des milliers d’années et sur les questions stratégiques, il n’y a pas de grands désaccords.” Même harmonie affichée avec les Républicains américains. Son gouvernement partage leurs valeurs – nation et famille – et leur ennemi juré: le wokisme. Reste à voir si les électeurs choisiront Ron DeSantis, qu’il juge “merveilleux”, ou plutôt Donald Trump, un “vétéran, comme Viktor Orbán”.

Enfin, sur la question épineuse des financements européens gelés – plusieurs milliards de subventions soumises à la réforme du système judiciaire -, Balázs Orbán juge la Hongrie victime des partis pris idéologiques de la Commission européenne. “Si nous laissons les institutions se politiser à outrance, la coopération européenne sera mise en péril”, prévient celui qui veut décidément toujours avoir le dernier mot.